CHAPITRE QUINZE

L'homme paraissait vaguement déplacé dans le fauteuil capitonné du luxueux bureau et dans ses vêtements civils, malgré leur coupe coûteuse. Il avait les yeux durs et le visage sombre et mince, un de ces visages exercés à ne manifester que ce que leur propriétaire souhaite exprimer. Il prit le rafraîchissement qu'on lui tendait et en but une gorgée; les glaçons émirent un cliquetis musical quand il baissa son verre, tandis que son hôte s'asseyait dans le fauteuil en vis-à-vis en s'efforçant de ne pas avoir l'air inquiet.

« J'ai appris avec regret la nouvelle de vos... problèmes imprévus, monsieur Canning. » Le visiteur parlait d'une voix grave et bien modulée, presque douce, mais celui qui lui faisait face s'agita nerveusement sur son siège. « J'ose espérer qu'ils ne sont pas de nature à remettre en cause notre programme ? »

Wallace Canning, consul de la République populaire de Havre sur Méduse, sentit la transpiration perler à son front. Son interlocuteur était en civil mais, chaque fois que Canning le regardait, il voyait l'uniforme qu'il aurait dû porter – l'uniforme vert et gris d'un contre-amiral de la Marine populaire, frappé du sablier et de l'épée du service de renseignements de la Marine.

« Je n'en sais rien, dit-il finalement en choisissant soigneusement ses termes. Tout est encore trop incertain. Tant que nous ignorons quel sera le prochain mouvement de cette Harrington, nous en sommes réduits à émettre des hypothèses et à surveiller nos points faibles potentiels.

  Je vois. » L'amiral en costume d'affaires s'adossa dans son fauteuil en faisant tournoyer les glaçons dans son verre; il pinça les lèvres en écoutant le tintement des cubes, et Canning conserva tant bien que mal une expression impassible sous son regard qui ne cillait pas.

  J'ai le sentiment, reprit l'amiral au bout d'un moment, qu'il y a eu du laisser-aller chez vous, monsieur le consul. On nous avait assuré que la situation restait sous contrôle; je considérais ma venue comme une visite de routine où l'on devait simplement m'annoncer que tout était prêt, or j'apprends maintenant que vous ne pouvez qu'émettre des "hypothèses" sur les mouvements à venir de l'adversaire. » Il secoua la tête. « Il y a toujours un élément de risque dans une opération secrète, mais nous avons investi trop de temps dans celle-ci, et l'opération Ulysse est trop importante pour jouer aux devinettes ou lancer des manœuvres qu'un seul élément imprévu peut faire avorter.

  On n'y peut rien et ce n'est la faute de personne, ni ici ni sur le terrain, dit Canning en endossant le rôle de celui qui défend ses subordonnés plutôt que lui-même. Et l’élément imprévu" dont vous parlez était en effet totalement imprévisible et nul ne l'avait vu venir, ni ici ni sur Havre. Il était impossible de le voir venir, amir... monsieur, parce qu'il n'y avait aucun moyen d'imaginer, au bout de tant d'années, qu'on assignerait quelqu'un comme cette folle au poste de Basilic.

  J'en suis bien conscient. D'ailleurs, monsieur Canning, c'est moi-même qui ai choisi la date d'exécution d'Ulysse lorsque Pavel Young a été nommé chez vous.

  Eh bien, tout se déroulait selon le plan avant que cette femme n'arrive. Et depuis... » Canning s'interrompit et haussa les épaules en levant une main, la paume en l'air.

« Je conçois que les conditions aient changé, monsieur le consul. » L'amiral s'exprimait du ton patient que l'on prend avec un tout petit enfant, une douceur trompeuse dans le regard; le consul tremblait intérieurement mais se garda bien de protester.

« De plus, contrairement à vous, je possède un dossier sur le capitaine Harrington, poursuivit l'amiral. Il n'est pas aussi complet que je le souhaiterais. Comme vous le savez peut-être, les Renseignements de la Marine effectuent rarement des recherches de fond sur les officiers qui ne figurent pas encore sur la Liste, à moins qu'ils ne soient issus d'une famille particulièrement en vue. Tout ce dont nous disposons sur elle, ce sont les coupures de journaux habituelles et son dossier public, mais c'est déjà suffisant pour indiquer qu'elle est d'une tout autre catégorie qu'un crétin d'aristo comme Young. Et, tout bien considéré, je dois admettre qu'Harrington n'est pas du tout le genre d'officier qu'on aurait pu s'attendre à voir ce lourdaud de Janacek assigner à son petit enfer privé. »

Canning se détendit un peu, pour se raidir aussitôt devant le mince sourire de son visiteur.

« Néanmoins, monsieur Canning, je ne puis m'empêcher d'arriver à la conclusion que vous avez pris la question de la sécurité trop à la légère. Depuis le début, vous semblez vous être reposé, non pas sur vos précautions, mais sur la seule inefficacité de la Flotte. J'en conviens (il fit un petit geste de la main), cette inefficacité entrait pour partie dans notre plan d'origine, mais votre tort a été de compter sur sa pérennité. Il paraît évident qu'il fallait radicalement réévaluer vos dispositions dès qu'Harrington a commencé à donner des coups de pied dans la fourmilière.

  Je... » Canning se leva brusquement et se dirigea vers l'armoire aux alcools. Il se versa un martini d'une main légèrement tremblante, en avala une gorgée, puis se retourna vers l'amiral. « J'ai pris des précautions, monsieur, quoi que vous en pensiez. Je l'avoue, c'étaient des mesures de routine, à long terme, et je reconnais aussi avoir mis du temps à comprendre ce qui se passait et à réagir à la présence d'Harrington. Mais je suis à ce poste depuis plus de six années locales et c'est le premier officier manticorien qui ait seulement pris la peine de contrôler qu'il y avait le même nombre de boîtes de conserve sur un manifeste et dans la cargaison correspondante !

  Si elle se contentait de cela, monsieur Canning, ou même si elle ne faisait qu'arrêter des contrebandiers, nous serions beaucoup moins inquiets, répondit son hôte d'un ton glacé. Mais elle ne s'en tient pas là. Elle apporte une assistance active au commissaire Matsuko et à l'API; rien que la main-d’œuvre locale qu'elle a libérée des tâches de douane et de surveillance spatiale constitue une grave menace pour la sécurité de l'opération. Si on y ajoute les survols qu'elle a ordonnés, selon ce que signalent vos informateurs... » Il secoua la tête d'un air attristé et Canning prit une longue gorgée d'alcool.

« Nous ne sommes tout de même pas complètement démunis, monsieur, fit-il. Je sais que ce n'est qu'une question de temps avant que ses vols de reconnaissance décrochent la timbale mais, comme je l'ai déjà dit, et malgré la confiance excessive dont j'ai pu faire preuve, nous disposons d'une couverture à plusieurs niveaux contre ce genre d'éventualité, précisément. Et, en dépit de ses activités dans l'espace, elle n'a fait strictement aucun ennui au capitaine Coglin. Quant à ses autres initiatives, ajouta-t-il, sur la défensive, j'ai fait ce que j'ai pu pour la faire rappeler. J'ai déposé plus de vingt plaintes distinctes et je fais jouer mes relations avec d'autres agents commerciaux extraplanétaires pour en générer de nouvelles. L'amirauté manticorienne finira bien par réagir, surtout à la lumière des ramifications politiques de l'affaire.

  Je suis au courant de ces plaintes, monsieur Canning. Mais, si vous avez certainement raison quant aux pressions qu'elles exercent sur l'amirauté, avez-vous songé qu'elles ont sans aucun doute abondamment confirmé aux supérieurs d'Harrington que ses activités nous gênent ?

Canning rougit et, pour la première fois, une étincelle de colère franchit la barrière de son inquiétude. L'amiral avait beau jeu d'arriver tout pimpant après la bataille et de tout critiquer, mais que voulait-il donc que Canning fasse ? Nom de Dieu, déposer des plaintes, c'était la seule arme efficace dont il disposait! Et, se dit-il avec rancœur, s'il ne les avait pas déposées, l'amiral serait en train de lui découper les oreilles pour manque d'initiative !

« Enfin, ce qui est fait est fait. » L'amiral soupira, posa son verre sur une table basse et se leva. « Pourquoi ne me parlez-vous pas plutôt de ce qui va bien ? »

Il s'approcha du bureau de Canning et se pencha sur la carte déroulée sur le buvard. En papier, elle était beaucoup moins détaillée et bien plus difficile à manipuler qu'une carte holo, mais elle n'apparaissait nulle part dans la base de données du consulat. Et, au contraire d'un lecteur holo individuel, on pouvait la rouler et la cacher dans un coffre-fort muni d'un système de sécurité à destruction thermique, toutes considérations qui rendaient triviaux les inconvénients de l'objet.

L'amiral considérait la carte les sourcils froncés, en suivant du doigt certains tracés du terrain. À la différence de la plupart de ses contemporains de la Marine, il était aussi à l'aise devant une projection planétaire que devant une représentation stellaire, car la branche particulière et anonyme des Renseignements à laquelle il appartenait se préoccupait davantage de chevaux de Troie que de guerre ouverte. Il tapota le papier, puis regarda Canning.

« Le labo du plateau, ici, possède-t-il une liaison directe avec notre collecteur orbital ?

  Non, monsieur. » À son tour, Canning s'approcha du bureau, et il eut son premier sourire de l'entretien. « L'énergie est relayée 'par des stations au sol, ici et là (il indiqua deux sommets de l'intérieur), et la station réceptrice n'est pas reliée à notre collecteur. » Il croisa le regard interrogateur de l'amiral et son sourire s'agrandit. « Nous sommes branchés sur le propre collecteur de secours de dame Estelle.

  Comment? Vous puisez votre énergie dans le réseau manticorien ?

  Non, monsieur. Cette énergie ne passe pas par le réseau. Il s'agit de leur collecteur secondaire qui ne sert qu'au cas où l'on coupe le principal à fin d'entretien ou de réparation. En dehors de leurs tests normaux de débit, nous sommes les seuls à l'utiliser. Même s'ils découvrent notre dérivation, cela ne leur indiquera pas qui l'a posée et, s'ils cherchent à savoir comment elle est arrivée là, leur enquête devrait prendre des directions très... intéressantes.

  Je vois. » L'amiral hocha la tête, première manifestation d'un début d'approbation. « Mais, naturellement, s'ils la découvrent, ils découvriront aussi la station au sol qu'elle alimente, n'est-ce pas ?

  En effet, mais c'est là qu'intervient le plan de couverture dont je parlais. C'est le colonel Westerfeldt qui a la responsabilité des opérations sur le terrain et il s'est parfaitement débrouillé pour dissimuler nos traces et poser des leurres. Pour tout vous dire, nous voulons qu'ils trouvent les stations – et le labo – s'ils cherchent sérieusement. »

L'amiral leva les sourcils et Canning poursuivit avec un sourire presque naturel : « Nous avons installé un labo de repli qui fonctionne sur ses propres générateurs à hydrogène et, s'ils tombent sur celui-là, ils n'en apprendront guère – à moins qu'ils ne cueillent certains de nos gars, évidemment. Et encore, aucune pièce de matériel n'a été fabriquée en République populaire. L'essentiel de l'équipement a été manufacturé par... un certain cartel marchand de Manticore, dirons-nous. » Il se tut et, cette fois, ce fut au tour de l'amiral d'avoir un petit sourire entendu. « Plus important, le responsable de la sécurité et les techniciens sont aussi manticoriens et ils ignorent qu'ils travaillent pour nous; ils croient être employés par un groupement illégal de chez eux. Nous avons dû introduire des gens de chez nous pour faire fonctionner le labo de repli le cas échéant, mais là encore, le matériel provient de Manticore. Enfin, nous avons imposé à nos pigeons de tenir des comptes rendus soigneux pour leurs employeurs fictifs; si l'API découvre le labo, ils trouveront des documents parfaitement authentiques aux yeux des techniciens et qui pointent dans la direction opposée à la nôtre.

  Je vois », répéta l'amiral. Il promena distraitement son index sur la carte et son sourire s'effaça tandis qu'il l'étudiait, les sourcils froncés. Puis il désigna du doigt une zone loin au sud de l'immense plateau. « Et le site principal ?

  Il est parfaitement protégé, monsieur, répondit Canning avec assurance. Il est entièrement souterrain et il n'y a jamais eu le moindre contact entre lui et l'un ou l'autre de nos labos, même par air. Toutes les cargaisons transitent par cette zone de relais (du doigt, il désigna une région plus à l'ouest), puis elles continuent par voie de terre avec des caravanes échassieuses. De plus, les hommes sur place du colonel Westerfeldt ont été choisis avec soin pour pouvoir être sacrifiés si jamais l'API tombe sur eux. Contrairement aux techniciens de notre labo de secours, ils sont tous manticoriens, avec de gros casiers judiciaires, et aucun d'entre eux ne sait exactement pour qui le colonel travaille.

  Ah ! » L'amiral pencha la tête de côté et se permit un nouveau sourire, plus franc que le premier. « Peut-être me suis-je montré exagérément pessimiste, monsieur Canning. Apparemment, vous avez pris davantage de précautions que je ne le croyais.

  Je n'étais pas seul, répondit Canning. Comme je l'ai dit, le colonel Westerfeldt est notre homme de terrain et vos propres agents ont choisi une excellente couverture pour Coglin. Et puis, naturellement, l'ambassadeur Gowan a coordonné la plus grande partie de l'opération depuis Manticore. » Il dissimula un sourire en voyant l'amiral hocher la tête. Gowan était une très grosse huile, directeur à la retraite de l'Allocation et pourvu d'amis influents sur Havre. Il n'est jamais mauvais de partager le mérite (et les reproches éventuels) avec plus solide que soi, et même les Renseignements hésiteraient avant de s'en prendre à Gowan.

  Bien », fit l'amiral au bout d'un moment en retournant à son fauteuil pour récupérer son verre. Il but une gorgée en contemplant par la fenêtre, l'air songeur, la nuit et les jardins du consulat illuminés par des projecteurs. « Votre sécurité au sol est en meilleur état que je ne le craignais, mais le flanc orbital reste béant, et c'est par là que cette Harrington peut nous faire le plus de tort.

  Oui et non, monsieur. » Canning vint se placer à côté de l'amiral et observa lui aussi les jardins. « Il est trop tard pour qu'elle intercepte les chargements réellement importants; tout ce dont nous avons besoin se trouve d'ores et déjà sur la planète, à part la mekoha encore en cours de fabrication, et j'ai annulé de ma propre initiative les deux derniers transports extra-planétaires quand j'ai compris ce qui se passait. Je préférerais qu'ils soient au sol, mais nous pouvons nous débrouiller sans eux, et, s'ils se faisaient repérer, cela serait très dangereux. Quant à Coglin, il ne devrait rien risquer s'il se contente de rester sans bouger à bord de son bâtiment. S'il n'établit aucun contact avec la surface, Harrington n'a aucun motif de venir fourrer son nez chez lui.

  Très bien. » Le ton de l'amiral était sensiblement moins hostile et Canning se détendit encore. Mais brusquement l'amiral pinça de nouveau les lèvres. « Néanmoins, même si tout se passe parfaitement, l'Intrépide, par sa simple présence en orbite médusienne, risque de faire échouer l'opération lorsqu'elle sera lancée. Je n'aime pas voir Harrington travailler main dans la main avec l'API. Elle dispose d'une compagnie presque complète de fusiliers manticoriens là-haut, avec un matériel de combat qui pourrait bien nous mettre à mal.

  Sauf votre respect, monsieur, je crois que c'est peu probable. Il faudrait qu'ils sachent ce qui se prépare et qu'ils aient prévu des plans de rechange pour affecter l'opération de façon appréciable. Oh, je ne nie pas qu'ils puissent limiter les dégâts, mais je ne vois absolument pas comment ils pourraient les limiter assez pour faire une quelconque différence. Tant qu'ils ne peuvent pas empêcher toute l'opération, la porte reste ouverte, et même une compagnie entière de fusiliers déjà en place dans les enclaves ne pourrait nous barrer la route.

  Peut-être. » L'amiral se balança un instant sur la pointe des pieds en suivant le bord de son verre du bout de l'index. (Mais peut-être que non. Que disent vos informateurs de Manticore sur Young ?

  Il a ramené son bâtiment sur l'Héphaïstos et, bien que notre réseau de renseignements soit assez faible du côté militaire, tout indique qu'il a pris conscience d'avoir gaffé. À mon avis – mais c'est seulement une opinion –, il fait tout pour revenir à Basilic avant que les agissements d'Harrington ne donnent de lui une image encore pire.

  On aurait du mal à donner pire image de lui, de toute façon », observa l'amiral avec un sourire ironique.

Il continua de se balancer quelques secondes, puis il hocha la tête.

« Tâchez d'apprendre combien de temps il va demeurer sur l'Héphaïstos, monsieur Canning. Je suis sûr que son premier geste, en revenant ici, sera d'envoyer Harrington aussi loin de Méduse que le permettent les limites du poste de Basilic et j'aimerais bien mieux le savoir, lui, en orbite là-haut quand tout se déclenchera. S'il doit rentrer dans moins de... allons, un mois manticorien à peu près, je veux qu'on retarde l'opération jusque-là.

  Cela risque d'être difficile, fit Canning d'un ton circonspect. Presque tout est déjà prêt, et notre chamane est mûr. Je ne suis pas certain qu'il puisse les tenir aussi longtemps. L'heure H définitive est toujours restée imprécise, vous savez. Et puis il y a sans doute une limite au temps que Coglin peut demeurer là-haut sans bouger avant que quelqu'un du genre d'Harrington commence à nourrir des soupçons.

  Peut-être; mais, je vous l'ai dit, je n'ai pas envie de voir Harrington dans le coin quand l'opération se déclenchera; si possible, j'aimerais qu'elle se trouve à plusieurs heures d'ici, assez loin pour nous donner l'avance dont nous avons besoin. Quant à Coglin, je pense que sa couverture tiendra encore un peu et je peux m'arranger pour conserver nos autres atouts en place trois ou quatre mois manticoriens si nécessaire.

  Je vais voir ce que je peux faire, monsieur. » Canning avait l'air dubitatif et l'amiral sourit.

« Je n'en doute pas, monsieur Canning. Et, entre-temps, je vais voir ce que nous pouvons faire pour... recanaliser l'énergie du capitaine Harrington.

  J'ai pratiquement épuisé toutes les ressources diplomatiques, observa Canning.

  Non, monsieur le consul. Vous avez épuisé les ressources diplomatiques de Havre, nuance. » L'amiral se tourna vers lui avec un sourire élargi et Canning leva les sourcils.

« Je ne suis pas sûr de bien vous suivre, monsieur.

  Allons donc ! Ne venez-vous pas de me dire que vous vous êtes donné bien du mal pour fournir aux Manticoriens un coupable proche d'eux? À quoi bon avoir un bouc émissaire si vous ne vous en servez pas ?

  Vous voulez dire...

  Naturellement, monsieur Canning. » L'amiral, à la surprise de son hôte, émit un petit rire. « Il est évident qu'Harrington agace les cartels marchands de Manticore autant que nous. D'après ce que vous me dites de ses opérations, elle leur a déjà coûté chaud, sans parler de l'humiliation qu'elle leur a fait subir en les prenant la main dans le sac. J'imagine que la plupart ont tout aussi envie que nous de lui voir rogner les griffes, vous ne croyez pas ?

  Oui, acquiesça Canning, et un sourire apparut lentement sur son visage. Oui, j'imagine, en effet. Mais, selon la même logique, ne peut-on penser qu'ils ont déjà exercé toutes les pressions possibles sur le gouvernement et l'Amirauté ?

  Voire. Mais je songeais à une action un peu plus directe, fit l'amiral d'un air inquiétant, et j'étudie le dossier du capitaine Harrington depuis que j'ai appris la situation actuelle. Je vous l'ai dit, il n'est pas aussi complet que je le souhaiterais, mais on y trouve néanmoins des renseignements potentiellement utiles. Par exemple, saviez-vous que son père et sa mère sont tous deux médecins ? » Canning fit non de la tête. « Eh bien, si. Ils sont même associés principaux de la Corporation médicale Duvalier sur Sphinx. C'est un excellent établissement qui jouit d'une haute réputation en chirurgie neurale et génétique... et il se trouve justement que soixante-dix pour cent des actions publiques de Duvalier appartiennent à Christy & Fils, qui est à son tour une filiale à part entière du cartel Hauptman. » L'amiral eut un sourire presque rêveur. « J'ai toujours su que garder un œil sur Hauptman nous serait utile un jour, avant même qu'on ait l'idée de cette opération.

  Mais Hauptman le sait-il seulement, monsieur ?

  Peut-être pas encore, mais nous pouvons sans doute attirer son attention sur ce point – discrètement, cela va de soi. Nous avons d'ailleurs déjà attiré son attention sur d'autres points par le passé, n'est-ce pas ?

  En effet », répondit Canning. Le front plissé, il réfléchit aux ficelles à tirer. « Mon courrier régulier adressé à l'ambassadeur Gowan part demain matin, dit-il, pensif.

  Excellente suggestion, monsieur Canning. » L'amiral hocha la tête et leva son verre pour porter un toast. « Au capitaine Harrington, puisse-t-elle avoir bientôt d'autres chats à fouetter », murmura-t-il.

Mission Basilic
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